Au boulot !

La Quiaca (Argentine) - Villazon (Bolivie) : 50 m entre ces deux villes et une heure de decalage horaire. Nous voici donc apres les formalites d'usage en Bolivie.
Nous sommes a 3200 m d'altitude et il est 07h00 du matin.... Hace frio ! Nous ressortons nos polaires, bonnets et gants ! On se rechauffe avec diverses boissons locales en attendant notre bus : jus de quinoa, un cafe, un mate de coca et une boisson typique, le "api" : un melange de jus de mais violet, de cannelle et de clous de girofle... servi brulant.
Nous decouvrons les premiers visages boliviens, les femmes aux cheveux tresses et aux jupes plissees.
Trois heures plus tard, nous montons dans le bus nous emmenant a Tarija, lieu ou nous effectuerons deux semaines de wwofing (World Wide Opportunities on Organic Farms) soit un travail benevole dans une ferme bio en echange du gite et du couvert. La piste creusee a flanc de colline longe des precipices abrupts... on apprendra par la suite qu'elle est reputee meutriere...
Nous arriverons (entiers) et fatigues au terminal de bus de Tarija et attendrons impatiemment l'arrivee de John, le proprietaire de la ferme.
Une heure et demie plus tard, c'est une jeune fille d' 1m 80, vetue d'un jean et d'un tee-shirt moulant qui vient vers nous... elle nous parle en anglais... c'est la fille de John ! Nous qui pensions vivre a la bolivienne sommes quelque peu desappointes ! A peine assis dans la voiture, Alyson recoit un coup de fil de son pere lui demandant de nous deposer pour la nuit dans un hotel en ville... rien n'est pret pour nous accueillir !
Nous tachons de prendre cela a la legere, bien que cela soit difficile! Le lendemain matin, c'est en taxi que nous arriverons chez John...Nous commençons a travailler des l'apres midi : Olivier dans le compost et le fumier, Helene dans les oignons.

a table, les legumes bios !

Helene qui s'occupe de ses oignons...

Le soir a 17H , nous sommes seuls dans la ferme. Cette famille ne fait que se croiser. Le pere d'origine anglaise installe ici depuis 30 ans est agronome et travaille de ferme en ferme, la mere d'origine roumaine s'en va a La Paz des ce soir. Alyson se leve a 11h et prend des cours du soir de 19h a 22h...
Ce soir la on s'interroge beaucoup : le travail n'est pas un probleme mais les a-cotes, echanges, discussions, decouverte de la culture, qui sont essentiels dans cette demarche de benevolat sont inexistants.... Pour preuve ce soir nous devons quemander a John quelque chose a nous mettre sous la dent car lui se couche sans manger en rentrant du travail ! La nuit porte conseil ...

Le lendemain, nous retournons a 7h18 dans notre champ ( car a 7h15 John nous y attendait deja !). Nous profitons d'une pause pour elaborer notre plan de sortie. Helene motive Olivier pour partir des midi afin de profiter de la demi journee pour trouver une autre ferme.

C'est le ventre serre que nous annonçons a John notre intention de partir. Celui ci vert de rage defait sa boucle de ceinture et fouette violemment Helene au visage ( non on deconne c'est juste pour voir si vous lisez le texte ou regardez seulement les photos !! ).

John nous ecoute et nous dit qu'il a adhere au Woof afin d'avoir de la main d'oeuvre pour ses champs. Il insiste tout de meme pour que nous dejeunions avec lui.... Bonjour l'ambiance lors du dejeuner !
De retour dans le centre de Tarija, nous ne perdons pas de temps et prenons contact avec Don Jesus Romero, proprietaire d'une bodega dans la vallee de la Conception ( 30 minutes de Tarija ). Nous sommes soulages d'etre attendus le lendemain et sommes convaincus d'avoir fait le bon choix.

¡ Don Jesus ! Quel nom, tout un personnage. 56 ans presque toutes ses dents et surtout un sacre bon vivant.

" Donde hay vino, hay amor "
Tel est son art de vivre ici dans la province de Tarija. Professeur d'universite puis depute, il rachete en 2002 cette propriete dans la vallee de la Conception. Dans sa bodega d' 1.5 hectare, il produit artisanalement un vin rouge et un vin blanc issus de cepages Cabernet et Sangiovese. Il y recoit des groupes de touristes auxquels il fait deguster " el vino por metro " ( le vin au metre ). C' est pour lui tout un rituel et il faut le voir, Don Jesus et sa ceremonie de la " destapa de la Dama Juana " ( debouchage de la Dame Jeanne ).

ceremonie serieuse...

- main sur le coeur, faire trois voeux : un pour soi, un pour sa famille, un pour le lieu ;
- se saisir du tube plastique et exprimer oralement ses trois voeux ,
- aspirer dans les deux metres de tube afin de les remplir de vin ( principe des vases communicants ) puis, s'exprimer en une phrase sur le breuvage ;
- beaucoup dans ce cas entonnent une copla ( complainte ) comme celle ci :

- enfin aspirer et boire les deux metres de vin.
Nous ne faillirons pas a cette tradition et ferons honneur a la " boisson des dieux ".

Entre degustation, fete du vino nuevo ( voir plus bas ) et discussions bien arrosees avec les gens de passage, vous vous demandez peut etre en quoi consiste le travail benevole ?
En cette saison, le vin est deja recolte et presse. Notre contribution sera d'une part de clarifier et d'autre part d'embouteiller le vin de l'annee derniere.
En quoi consiste la clarification ?
Le vin contenu dans un bidon de 220 litres doit etre nettoye des sediments accumules au fond puis filtre. Petit secret de vigneron ! Nous nettoyons le bidon avec du singani, l'alcool fort local.

la clarification du vin ... Hum, ca sent bon...!

Une fois le bidon rempli du vin filtre, il fait enlever l'air dans les cavites creuses afin d'eviter l'oxygenation du vin...et un gout de vinaigre ! Pour cela, encore un principe de physique : nous inserrons une manguerita ( petit tube creux en plastique ), dans les cavites afin que l'air s'evacue pendant que nous completons a rabord le bidon. Au final on le scelle avec un bouchon de platre.En tout et pour tout, a trois nous avons clarifier environ 1200 litres de vin, Don Jesus arrivant a une production annuelle de presque 2500 bouteilles.

l'embouteillage...on s'est fait les muscles ce jour-la...

Rassurez vous, chez Don Jesus, on alterne travail, fiesta et descanso ( repos ) ! Voici pour exemple una caminata ( petite promenade ) dans la vallee de la Conception.

"Dans la vie, il y a des cactus, moi je me pique de le savoir...."

Cela faisait 30 ans que Don Jesus n'etait pas revenu sur ses terres qui l'ont vu naitre ! Quelle fierte de nous les faire decouvrir !

La fiesta du vino nuevo.

Dimancher 24 mai, grosse organisation pour les woofers : preparation des tables, chaises, nappes, podiums, baches,....et bar !
On attend une centaine de personnes et un groupe de La Paz fait meme le deplacement pour animer la fete. Les Dame Jeanne sont pretes, nous aussi :

Prete a recevoir les invites !

Notre travail consistera a nettoyer puis remplir les bouteilles vides grace encore une fois a la manguerita...attention en aspirant avec la bouche a bien bloquer l'arrivee du vin dans le tube, sinon...a chaque bouteilles commandees : une petite gorgee...

Vous voyez ici Julien a l'ouvrage, un autre francais venu donner un coup de main.

On commencera la fete a 9h jusque tard dans la nuit, se faisant offrir regulierement des coups car la presence de francais - pour une fete du vin - est forte appreciee .

" Te invito, voici deux mots qui font qu'a la fin de la journee...tu te sens un peu fatigue !
Quand un bolivien t'invite a boire, tu peux difficilement refuser...Ici le vin se partage dans le meme verre : tout le monde boit dans le meme recipient, on invite son voisin en prononcant " te invito", on boit puis on fait de meme avec la personne a cote...
Autant dire que plus le groupe de personne est reduit, plus le verre arrive vite ! "
Helene

egloueglouegloueglou.......

" Ici les gens dansent et chantent facilement. La veille de cette fete j'ai eu l'occasion d'apprendre un acoñplainte avec l'ami de coeur ( cumpa ) de Don Jesus. Voix de tenor, tremolos, ambiance chorale Totout' art, je pensais bien a vous les gars...

Il etait des lors question de la chanter le jour de la fete ! J ai attendu cette personne toute la journee et le soir venu, apres donc une longue attente et donc beaucoup de verres de vin, nous avons entonne cette copla a qui voulait l'entendre ! Ecoutez : "

Olivier

" En effet, Olivier avait un verre dans le nez et avec Lola, nous n'en pouvions plus de cette chanson "
Helene

Epuises par cette journee, nous laisserons Don Jesus seul dans sa cave marmonner d'incomprehensibles paroles agrementees de palabres philosophiques du style" la vida es grande, eso es la vida ".

Rrrrf, Rrrrf, Rrrrf !!

Le premier leve le lendemain...sera Don Jesus, qui dejeunera a la biere avec d'autres cumpas a lui !


" Toute la matinee, j'essaye de m'esquiver, allant jusqu a leur acheter des bieres pour eviter de m'asseoir avec eux et boire boire boire ! "
Helene


" Mon leve fut plus tardif que les filles...mais je me retrouve aussitot attable a partager bieres et chansons. Je ferai honneur en interpretant le " Dio Vi Salve Regina ", chant corse de ma chorale Totout'art bien aimee "
Olivier

Ne voyez pas dans ces rendez vous uniquement le plaisir de...boire, ce sont des moments importants passes entre amis, l' occasion de parler du passe difficile, de violences et de corruption et de l'avenir politique de la Bolivie. Au pouvoir depuis 2007, Evo Morales, premier amerindien au poste de president, est tres conteste dans cette riche province de Tarija.
Il souhaite nationnaliser les entreprises, repartir au mieux les richesses, rendre les langues indigenes obligatoires a l'ecole. Les boliviens rencontres ici nous expliquent que les nationnalisations consistent a exporter le gaz, le minerai, les produits bruts et a acheter les produits raffines !
Peu de retombees pour la population. La politique fait vivre les boliviens au jour le jour, aucune creation d'usine boliviennes n'etant prevues a ce jour, le pays reste donc sous le joug d'entreprises privees etrangeres.
Avis partages entre boliviens sur les langues a l'ecole: en quoi le Quechua ou l'Aymara pourra t-il aider un eleve a travailler a l'etranger ? pour d'autres c'est la fierte de retrouver une tradition et de pouvoir converser avec ses grands parents...
Bien des discussions en perspective, des desaccords et des mises au point, l'avenir de ce riche pays est incertain, sur une voie de l'amelioration mais que le temps parait long en attendant les changements...

La region de Tarija, outre ses vignes ( hips) recele d'autres tresors... archeologiques et paleontologiques. C'est en compagnie d'un professeur de l'universite de La Paz que nous avons arpente une zone couverte de fossiles de chevaux, glyptodontes et mastodontes datant de milliers d'annees.

une bel espece de glyptodonte...et le prof !

aie, aie , aie je suis tombee sur un os....

Et comble de magie, en revenant au bercail, nous observons, en levant la tete par hasard, une eclipse de lune.

" Tiens ca sent le gaz ! une odeur bizarre se degage dans le taxi qui nous emmene sur le site paleontologique. Est -ce Lola ? est-ce Helene ? Oui ce sont bel et bien elles ... qui ont raison : le taxi fonctionne bien au gaz malgre mon incredulite. 130 kilometres avec une bouteille de gaz, deux dans le coffre et le danger permanent d'explosion qui va avec... serrez les fesses, serrez les fesses !"
Olivier

Et en plus observez bien on peut se passer le volant !

Ce soir la, nous feterons avec du vin ( pour changer ) et de la viande ( ! ) l'affectation d'Helene dans une ecole a Lille pour la rentree.

Le premier juin, nous quittons Don Jesus, Donia Vikie la concierge...et tout le petit monde connu au cours du woofing...nous prenons la route vers la ville de Potosi.

Au revoir Tarija, fini le woofing...

et merci encore aux mamas cuisinieres du marche.

A bientot, on vous laisse avec ces publicites pour le vin...no comment !

Attention, l'abus d'alcool est dangereux pour la sante...